Immeuble Brunon, le Patrimoine National refusé par Deferre

174 Rue Consolat, 13004 Marseille
2290
Immeuble Brunon, le Patrimoine National refusé par Deferre
Arrondissement : 4ème
Site Internet : emperi-museum.org
En 1886 monsieur Masseillon un riche collectionneur décide la construction de cet hôtel particulier et en confie sa réalisation à l’architecte Théodore Dupoux. Niches à fronton, pilastres corinthiens cannelés, colonnettes, culs-de-four à coquilles : l’inspiration est de style ornemental italien. L’œuvre sera poursuivi par Paul Brunon, négociant en tabac puis son frère Jean ; le sculpteur Carli en magnifiera le plafond. L’hôtel particulier deviendra ensuite musée militaire sur 3 étages…les premiers éléments d’une impressionnante collection de 15 000 pièces liées à l’histoire des armées françaises et étrangères. L’auteur de cette collection, Jean Brunon, très réputée au niveau national puis international, souhaitait naturellement en faire don à sa ville de Marseille…mais le maire Gaston Deferre déclina l’offre ! La collection est aujourd’hui promue au rang de patrimoine national et dévolue au musée de l’Armée des Invalides à Paris et au château de l’Empéri à Salon-de-Provence…la cité phocéenne a loupé le coche !

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Les frères Brunon en 1902

Les frères Raoul Brunon et Jean Brunon sont issus de la bourgeoisie marseillaise. Ils habitaient rue Consolat, au numéro 174, où leur père, riche négociant en tabac d’origine rouennaise avait fait construire en 1886 par l’architecte Théodore Dupoux (le créateur en autre de l’Eglise St Martin d’Arenc) un hôtel particulier de style composite, proche de celui de la famille Grobet-Labadié. Enfants ils collectionnent image d’Épinal, soldats de papier à découper et petits soldats de plomb. L’adolescence prenant le pas sur l’enfance, les jouets sont vite remplacés par des pièces véritables : fusils, shakos, casques et autres sabres. La collection démarre réellement à partir de 1908, et les deux frères transforment peu à peu leurs chambres en musée. Mais ils sont tous les deux mobilisés en 1914. Jean Brunon s’engage en 1914 dans l’Infanterie coloniale puis passe au 57e Régiment d’artillerie de Toulouse où il fait toute la guerre. Raoul, passionné d’histoire, incorporé dans l’infanterie, sera tué au Chemin des Dames au Champ d’honneur le 23 octobre 1917. Jean reviendra indemne de la Première Guerre mondiale. Libéré de ses obligations militaires après 4 ans de combat, il retrouve la petite collection de souvenirs militaires commencée par son frère. Il l’enrichit en l’entassant sur 3 étages, dans sa maison de la rue Consolat, la collection atteint alors 300 pièces. Il arpentera en pèlerinage dès 1919 les champs de bataille en y récupérant pour la mémoire des combattants des pièces et souvenirs témoignant plus de la souffrance des hommes que de la gloire des combattants…

Soucieux d’élargir le champ de ses connaissances, il rejoint très vite « La Sabretache » qui rassemble connaisseurs et collectionneurs et dont elle est un véritable vivier français. Il décide alors de se spécialiser sur la période post Louis XIV jusqu’au Second Empire, en éludant finalement la Première Guerre mondiale, du fait sans doute des douloureux souvenirs. Les ressources multiples de ces collections sont mises à contribution par maints organismes avec lesquels ses contacts sont ininterrompus : l’État-major de l’Armée, les corps de troupes de toutes armes et la Marine, les musées et bibliothèques français et étrangers ainsi que quelques grandes maisons d’édition, telles Larousse, Flammarion et Payot. En même temps que sa collection, Jean Brunon s’organise et constitue un véritable recueil d’archives et sa bibliothèque.

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Collection Jean Brunon

Grâce à ses recherches, il va pouvoir être un des premiers à rappeler que Napoléon avait créé et organisé un corps de cavalerie : les Eclaireurs de la Garde impériale, commandé par Claude Testot-Ferry, qu’il mettra en lumière dans deux de ses livres.  À partir de 1934 la renommée de la collection devient nationale grâce à un article dans le journal L’Illustration. D’un point de vue qualitatif comme quantitatif, la collection dépasse largement le cadre privé. En 1936 est créé sous le haut patronage du Prince de Monaco, du Maréchal Franchet d’Esperey, du Général Weygand et de soixante autres personnalités militaires, littéraires et artistiques, une association désignée sous le nom des Amis de la collection Raoul et Jean Brunon. Le Général Brécard et Jean Brunon lui-même en sont les fondateurs, afin de transmettre au public ce trésor. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il « soustrait » aux Allemands 44 drapeaux et étendards ainsi qu’un fichier de militaires.

Cette période de guerre met un coup d’arrêt à la collection, mais Jean Brunon se distingue à nouveau à la libération par des voyages récurrents en Allemagne afin de rendre à la France nombre de trésors nationaux emportés par les troupes d’occupation à partir de 1940.

L’immeuble Brunon de nos jours , photo de l’annonce immobilière de l’agence Espaces Atypiques

En 1950, il est élu membre de l’Association des écrivains de langue française, membre du Conseil d’administration du musée de l’Armée de Paris et membre de l’Académie des sciences, arts et lettres de Marseille. Jean Brunon est également élu membre correspondant de la 1re section de l’Académie des sciences coloniales en 1953. Après plusieurs expositions, dont la plus célèbre en 1955 au Palais de la Bourse à Marseille, Jean Brunon se tourne naturellement vers sa ville natale pour faire don de sa collection. Gaston Defferre, alors député-maire de la cité phocéenne décline l’offre, et Jean Brunon se tourne alors vers Salon-de-Provence, où il avait organisé sa 21e exposition en 1965. En 1967, avec l’appui de Jean Francou, maire de Salon-de-Provence, et Pierre Messmer, ministre des Armées, la collection, promue au rang de patrimoine national, est dévolue au musée de l’Armée (Hôtel des Invalides à Paris). Des expositions sont organisées en attendant la reconstitution au château de l’Empéri à Salon-de-Provence. Dans les années 1970, la collection s’exporte profitant de l’énorme engouement autour du Premier Empire : Montréal en 1974, Londres en 1976, puis Yorktown et enfin le Japon. Le 23 mai 1982, Jean Brunon meurt à Fourquevaux dans la Haute-Garonne à l’âge de 86 ans et il est inhumé à Marseille au cimetière Saint Marcel, carré 21. Son fils Raoul, reprend le flambeau et modernise le château de l’Empéri en ouvrant de nombreuses nouvelles salles.

L’immeuble du 174 rue Consolat, abrite aujourd’hui les bureaux d’architectes et un temps la Maison de l’Allergie et de l’Environnement. Un superbe loft se trouve au dernier étage (voir l’onglet photo).


SOURCES Wikipédia Raoul et Jean Brunon & academieoutremer.fr
PHOTOS Dominique Milherou Tourisme-Marseille.com & emperi-museum.org & Espaces Atypiques
A NOTER Ce site est un blog personnel, ces informations sont données à titre indicatif et sont mises à jour aussi souvent que possible. N’hésitez pas à me contacter pour toute correction ou contribution

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